Tu vas te taire ?

Je parlais des bébés l'autre fois. c'est vrai, j'ai du mal avec ces créatures étranges et je suis jalouse aussi.
 Ben oui, essayez, vous, de hurler après votre patron parce que vous voulez, là, immédiatement, tout de suite, aller déjeuner et je doute qu'il vous dise "oui, oui mon bébé, j'arrive".

Non seulement on fait leurs  volontés mais certaines mères vont, elles, jusqu'à largement les dépasser.

Je vous présente mon neveu Aymen. Premier petit neveu de la famille, donc centre de toutes les attentions d'autant que dès sa naissance il a été aussi le sujet d'une dispute colossale pour un motif ridicule : son prénom.

Bref.

Aymen vient donc avec sa mère un an plus tard. Tellement agité qu'en une semaine on  l'a envoyé deux fois à l'hosto se faire recoudre parce qu'il utilisait le canapé comme trampoline, la chaise comme toboggan et les poignées de meubles pour se balancer et moi de regarder ma mère d'un air "tu vois pourquoi je n'en veux pas maintenant ?".

Jour de Juin, miracle, Aymen dort dans sa poussette après avoir écrasé copieusement avec les pieds l'équivalent de 500 grs de chips sur la moquette. Je propose à ma soeur de prendre le chérubin et se promener sur les quais.

Calme journée d'été, touristes mangeant des glaces, soeur entrain de discuter quand Aymen se réveille en hurlant quelque chose comme "zozizozorinze". Je le regarde, ma soeur le regarde , Il hurle encore plus fort "ZOZOZOZORINZE !!!!!".

Ma soeur ne réagit pas mais les gens commencent à se retourner au fur et à mesure qu'il monte le son.
Voyant que ca ne suffit pas il aggrippe sa poussette et la secoue dans tous les sens manquant de la retourner avec lui dedans : "ZOZIZOZORINZE !!!!"

"Mais bon sang ! je dis à ma soeur, qu'est-ce qu'il veut ?"
" ah, me répond elle calmement, il veut du jus d'orange"

Légèrement touchée par le petit bout dont je croyais que seule la soif motivait les performances vocales, je vais chercher du jus d'orange que sa mère met dans le biberon et là le môme se met à hurler et lance le biberon de toutes ses forces lequel s'ouvre sur le pantalon d'un passant.

Pas de réaction plus violent que çà, ma soeur, va s'excuser, prends le biberon, l'essuie et le range pendant que le petit, devenu écrevisse, continue de s'égosiller.

Là je commence à prendre la même couleur que lui et je lui demande "mais c'est quoi son problème ?"
Toujours aussi calme elle me répond "il veut boire à la canette"
- "mais il est trop petit !"
- "oui je sais mais c'est comme çà"
- "ben donnes-lui alors"

Le petit tente de boire, s'étrangle, s'énerve, secoue sa poussette dans tous les sens, trouve le moyen de se lever et de se retourner. La poussette tangue dangereusement alors ma soeur le détache et le prend dans les bras.

Sans cesser de hurler, la chose devenue violacée en profite pour donner des coups de poings et de pieds à sa mère qui lui dit
- "puisque c'est comme ça tu vas marcher" et le pose
Il s'assoie par terre en hurlant, les gens se retournent sur leur passage, certains viennent voir
Ellle essaie de le lever, il se traine et hurle.
Elle le reprend dans les bras il la frappe.

Mon sang n'a fait qu'un tour. j'attrape la créature par les bretelles de sa salopette. Je l'approche à 5 centimetres de mon visage et je hurle à plein poumons "TU VAS TE TAIRE OUI ????"

De surprise, le mioche se tait d'un seul coup. ca m'a tellement fait drôle après ses hurlement que mes oreilles en bourdonnaient encore. Je prend donc le gosse, je le pose délicatement dans sa poussette, le sangle et on repart.

Silence radio. Calme fin de journée. Touristes mangeant des glace et soeur entrain de .... pleurer ????
Ben oui, faut croire que c'était bien des larmes que je voyais sur les joues de ma soeur.
Pensant que c'était à cause du cinéma du petit qui devait la fatiguer tous les jours, je lui demande doucement

"qu'est-ce qui ne va pas ?" et là elle me répond "Tu y es allée fort là, le pauvre, pauvre Aymen"

Je n'ai pas eu le temps de me mettre en colère : dès que la créature a entendu son prénom elle s'est automatiquement remise à hurler.

Heureusement nous étions pratiquement rentrées...

12 ans plus tard il ne s'est toujours pas calmé.
Normal.
On l'avait pourtant prévenue qu'Il ne faut jamais donner à manger à un mogoaï après minuit.